Le monde à l’envers… Quelques jours après le coup de poignard dans le dos de l’allemand OHB, qui poussait la Commission européenne à lancer ses satellites Galileo avec SpaceX plutôt qu’Arianespace, c’est le géant américain Amazon qui fait définitivement décoller Ariane 6, en lui offrant la plus grosse commande de son histoire. En marge du salon Space Symposium de Colorado Springs, près de Denver (Colorado), le groupe de Jeff Bezos a annoncé mardi 5 avril la commande de 18 lancements d’Ariane 64, la version la plus puissante du nouveau lanceur lourd européen Ariane 6.
Ces lancements permettront de mettre sur orbite une partie des 3.236 satellites de la future constellation Kuiper d’Amazon, destinée à apporter le haut débit partout dans le monde. Le reste des lancements sera réparti entre la fusée Vulcan d’ULA, la coentreprise entre Lockheed Martin et Boeing, qui effectuera 38 lancements, et le lanceur New Glenn de Blue Origin, le groupe spatial de Jeff Bezos, sélectionné pour 12 tirs plus 15 en option.
Ce contrat géant est un énorme soulagement pour Arianespace. Le groupe était confronté à un redoutable effet de ciseau: d’un côté, l’indisponibilité des lanceurs russes Soyouz, que le groupe européen devait tirer à neuf reprises cette année ; de l’autre, la fin de développement poussive d’Ariane 6, dont le premier vol, toujours annoncé fin 2022, pourrait glisser à 2023.
Concrètement, Arianespace se retrouve en manque de lanceurs disponibles: Soyouz n’est plus là ; Ariane 5, en fin de vie, affiche complet pour ses 5 derniers vols ; et Ariane 6 n’est pas encore disponible pour prendre le relais. La méga-commande d’Amazon redonne un coup de boost à toute la filière européenne, dont le soutien à Ariane 6 commençait à s’effriter, notamment en Allemagne.
“Ce contrat, le plus important que nous ayons jamais signé, constitue un grand moment dans l’histoire d’Arianespace, assure son président exécutif Stéphane Israël. [Il] marque un succès décisif pour le programme Ariane 6 et toute sa chaîne de valeur en Europe.”