Les marchés financiers sont dans un double état d’esprit à l’approche de l’année 2018. Le sentiment que tout est cher. Et le sentiment que tout va bien. Les risques politiques (élections de l’année dernière), géopolitiques (Corée du Nord notamment) et économiques semblent avoir disparu, ou en tout cas, ne préoccupent plus les marchés. « Cette complaisance se traduit par une faible volatilité, ce qui donne une fausse image du risque », explique Laurent Gonon, directeur des gestions de BFT IM. La volatilité actuelle n’est, en effet, pas représentative du risque futur. Il conseille donc de rester prudent et vigilent d’autant plus que les sources d’inquiétude vont réapparaitre et conduire à des phases de correction qu’il faudra gérer.
Une gestion attentive dans un contexte de faible volatilité
Le gérant encourage ainsi une gestion active : le choix des valeurs devient primordial ; et une gestion flexible, c’est-à-dire capable de réduire fortement l’exposition lorsqu’on « détecte un orage ». Pour cela, il faut de nouveaux instruments, notamment des outils quantitatifs qui permettent d’établir des prévisions fiables.
En observant l’historique de l’indice VIX (volatilité implicite 30 jours du S&P 500) de 1995 à 2017, la période actuelle de faible volatilité est semblable à celle précédent la crise de 2008. Nous sommes donc dans une « zone de risque de bulle si l’on considère l’approche quantitative seulement », a précisé le directeur adjoint de la gestion de BFT IM, Warin Buntrock. Trois points déterminent l’année 2018 selon le gérant : une croissance mondiale solide, un environnement politique plus stable pour la zone euro, et surtout, l’acceptation de l’inflexion des politiques monétaires par les marchés.
Qu’en est-il de l’inflation ?
En mettant en parallèle le taux de chômage et les salaires médians (retardés de six mois) aux Etats-Unis, on peut remarquer qu’il existe un délai de transmission entre le taux de chômage et les salaires. Mécaniquement les salaires devraient donc progresser dans six mois et l’inflation accélérer. Mabrouk Chetouane, responsable de la recherche et de la stratégie, a toutefois rappelé que la Fed s’est interrogée sur une possible transformation structurelle de la répartition travail-capital dans l’économie américaine. Si c’est le cas, les salaires n’augmenteraient pas automatiquement et l’inflation n’aurait plus de raison d’accélérer. La question aux Etats-Unis revient donc à savoir si la répartition des facteurs de production est structurellement en train de changer ou si la forte rémunération du capital n’est que passagère. Cependant, les équipes de BTF IM considèrent qu’une accélération de l’inflation aura bien lieu au second semestre 2018. Dans ce scénario, la zone euro fera face à une accélération de l’inflation après les Etats-Unis en raison de l’habituel retardement qui existe entre les deux zones.
Et les politiques monétaires ?
Dans un premier temps, il n’y aura pas de baisse de liquidité disponible, a expliqué Mabrouk Chetouane. En effet, en additionnant les rachats de la BCE et la réduction des réinvestissements de la Fed, l’injection nette de liquidité se maintient au même niveau que 2017 pour la première partie de l’année 2018. Ce n’est qu’à partir de juin, lorsque la BCE déclarera la fin de sa politique accommodante, qui devrait se réaliser fin 2018 selon les analyses de BFT IM, qu’il y aura un réel changement.
Dans ce contexte, le premier semestre sera une période où il faudra profiter du momentum des marchés actions et préparer les portefeuilles au probable changement de régime du second semestre 2018.