Analyse et Stratégie : M&G s'inquiète de valorisations tendues et du risque chinois

PARIS, 8 décembre (Reuters) – M&G Investments souscrit au scénario consensuel d’une croissance encore robuste et synchrone l’année prochaine accompagnée d’une remontée limitée de l’inflation permettant une normalisation progressive des politiques monétaires dont bénéficieront les actifs risqués, mais la société de gestion s’inquiète de niveaux de valorisation élevés et d’un ralentissement de la Chine.

En conséquence, M&G, dont les actifs sous gestion dépassent les 330 milliards de livres sterling (380 milliards d’euros), a réduit son exposition aux actions dans ses portefeuilles diversifiés pour la ramener à 42% contre 46% auparavant.

Sur le crédit, la société de gestion souligne le niveau tendu des valorisations avec un ratio de spread par unité de levier au plus bas depuis 2003 sur la dette en catégories d’investissement, tous secteurs confondus aux Etats-Unis, à 41 contre encore 68 il y a deux ans.

Pour le haut rendement et les notations BB, là encore tous secteurs confondus, ce ratio ressort à 69 contre 113 en moyenne sur les cinq dernières années.

“Les valorisations sont tendues et elles intègrent toutes les bonnes nouvelles et rien que les bonnes nouvelles”, a prévenu Florent Delorme, porte-parole des la gestion de M&G lors d’une présentation sur les perspectives 2018, à Paris.

La société de gestion a aussi divisé par deux le poids des obligations à haut rendement dans ses portefeuilles obligataires pour le ramener de 30% à 15%, pour leur substituer de la dette subordonnée de banques bien notées (AA) et de la dette souveraine émergente, notamment brésilienne et mexicaine en devise locale ou argentine en dollars.

LA CROISSANCE CHINOISE À 5,5% VOIRE 5%?

M&G ne croit ni à une brusque remontée de l’inflation, ni à une erreur des banques centrales sous la forme d’un resserrement trop rapide des politiques monétaires accommodantes, des risques parfois évoqués pour tempérer des scénarios de marchés pour 2018 généralement optimistes.

Une remontée brusque de l’inflation, principalement aux Etats-Unis, pays le plus avancé dans le cycle, impliquerait un emballement des hausses de salaires que la société de gestion n’envisage pas au regard de la faible capacité de négociation de salariés sous la menace d’une délocalisation de leurs emplois et d’un taux de participation de la population active toujours très inférieur au niveau d’avant la crise de 2008, ce qui laisse augurer de réserves de main d’oeuvre en dépit d’un taux de chômage proche de 4%.

Pour Florent Delorme, la très grande prudence des grandes banques centrales depuis le lancement des programmes d’assouplissement quantitatif rend peu probable une erreur de pilotage.

En revanche, la société de gestion s’inquiète du risque d’un ralentissement chinois plus marqué qu’anticipé pour l’instant par le marché, jugeant que la dynamique de l’endettement, aussi bien des entreprises que des ménages, n’est pas soutenable.

“Les autorités chinoises peuvent-elles ‘deleverager’ l’économie sans réduire significativement la croissance ?”, s’est interrogé Florent Delorme.

“Il suffirait que la croissance chinoise descende à 5,5% ou 5% l’an pour que cela entraîne une correction des actifs risqués, parce que ce serait une différence significative et que toutes les perspectives bénéficiaires des marchés actions devraient être revues à la baisse et les valorisations actuelles ne tiendraient plus”, a-t-il ajouté.

Rappelant qu’il est difficile d’avoir une vision précise de la situation de l’économie chinoise, il a estimé “qu’il y clairement un problème d’endettement en Chine”, le ratio d’endettement du pays étant passé de 142% du produit intérieur brut en 2006 à 254% dix ans plus tard, selon des données du Fonds monétaire international.

(Marc Joanny, édité par Marc Angrand)

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