Il s’agit d’une enquête en immersion “autorisée” sur ce groupe emblématique. Il ne faut pas attendre ici de scoops dérangeants sur l’entreprise, ses dirigeants et son actionnaire mais une description très précise du chemin parcouru et, il faut bien le reconnaître aujourd’hui, du pari réussi par le “gentil PDG” HGE.
Ce livre est-il une opération de communication de la part du Club Med?
Jean-Jacques Manceau – Dès 2005, j’ai fait le choix mener une enquête journalistique en collaboration avec le Club Med afin de pouvoir disposer de toutes les informations internes et tous les interlocuteurs que l’on n’obtient pas d’habitude quand on est journaliste. Ainsi, j’ai eu accès aux plans stratégiques et aux analyses des experts de l’entreprise mais je suis aussi allé à la rencontre de toutes les parties prenantes externes lors de l’OPA hostile qui avait été déclenchée en 2014 par le financier italien Andrea Bonomi, tous les banquiers d’affaires, tous les acteurs dont Serge Trigano et Bernard Tapie. Ce livre en anglais reprend tous ces éléments et d’autres plus récents concernant la victoire d’Henri Giscard d’Estaing (HGE) et de son partenaire Fosun dans cette bataille boursière homérique qui s’est soldée par un rachat de 100% du capital par Fosun et une période de grande stabilité capitalistique pour l’entreprise.
Quel bilan faites-vous de l’action de HGE après 20 ans comme PDG?
Je me souviens que lorsqu’il a lancé sa stratégie de “premiumisation” ou montée en gamme, tout le monde ricanait. Et c’est vrai qu’au début ce n’était pas concluant. Si la vision était la bonne, l’exécution a été plus longue que prévu. Mais l’entreprise perdait de l’argent et pour la sauver, il était plus que pertinent de miser sur cette fabuleuse marque pour proposer des vacances haut de gamme. C’était un pari très risqué car il fallait accepter de perdre une partie de la clientèle pas assez rentable et rompre définitivement avec l’image des Bronzés, qui était ancrée dans tous les esprits.
Je me souviens de présentations de résultats où les porte-paroles s’efforçaient d’annoncer des chiffres positifs sur la satisfaction ou la fidélisation afin de mieux faire passer les pertes financières. Cela a été long et avouons aujourd’hui qu’il n’y avait pas grand monde pour y croire. Mais aujourd’hui le pari est gagné. Le Club Med fait des profits, son image est repositionnée et la stratégie consistant à se développer en “asset light” est une réussite.
Les rumeurs sont légion aujourd’hui sur un retrait de l’actionnaire Fosun. Le Club risque à nouveau se retrouver dans l’oeil du cyclone?
Il est clair que l’entreprise a bénéficié d’une longue période de stabilité, c’est aussi l’une des clés de sa réussite. Ces rumeurs ont été démenties mais personne ne peut prédire l’avenir. Une chose est sûre: une entreprise rentable est bien plus forte pour affronter les vents contraires.
Qui sera le successeur d’Henri Giscard d’Estaing, 66 ans?
Je ne suis pas dans la confidence mais il y a un homme dont on parle peu mais qui occupe une place centrale, c’est Michel Wolfovski, le directeur général délégué du groupe. Il complète parfaitement HGE aujourd’hui à la tête de l’entreprise et peut lui succéder sans problème.
Il a 65 ans. Existe-t-il une relève?
C’est un énorme atout pour le Club Med, il y a des talents en interne. Les autres entreprises le savent fort bien, puisqu’elles viennent souvent débaucher des cadres de haut niveau. Impossible de citer tous les dirigeants potentiels, mais Gregory Lanter, le directeur général du développement et de la construction, Anne Browaeys, directrice générale des marchés Europe et Afrique et Gino Andreetta, directeur général des resorts en Europe et Afrique en font partie. La question est légitime mais le sujet n’est pas d’actualité tant que l’actionnaire fait confiance à HGE et que celui-ci veut poursuivre son action.