Chypre : après Total, ENI et Kogas renouvellent leur licence d’exploration

Alors que Total vient de renouveler ce mois-ci auprès des autorités chypriotes sa licence d’exploration, c’est au tour du consortium ENI-Kogas  (Italie/ Corée) , de voir sa licence d’exploration offshore d’hydrocarbures – prévue initialement jusqu’en février 2016 –  prolongée de deux ans par la République de Chypre. Des contrats intervenant certes durant la trêve des confiseurs mais d’une importance géostratégique mondiale notable, alors que Israël, Turquie, Égypte, Liban, Russie, Etats-Unis, Union européenne sont parties prenantes de ce large dossier traitant des ressources pétrolières et gazières au large de Chypre et d’Israël (mer Méditerranée orientale ).

Le ministre chypriote de l’énergie George Lakkotrypis a indiqué pour sa part qu’ENI-Kogas avait réclamé le renouvellement de cette licence jusqu’à février 2018 afin de disposer du temps nécessaire pour réexaminer sa stratégie d’exploration dans les eaux chypriotes. Le consortium n’a toutefois pas précisé quand il lancera une nouvelle opération de forage. Précisons qu’à l’heure actuelle, le consortium n’a découvert aucune réserve de gaz exploitables lors des forages qu’il a menés en eau profonde au large de Chypre.

En termes précis, ajoutons que le consortium ENI-Kogas a le droit d’exploiter les blocs 2, 3 et 9 dans la Zone maritime économique exclusive (ZEE) de Chypre. 

En octobre dernier, alors que venait juste d’être conclu l’accord entre la France et l’Egypte sur la vente des navires Mistral de DCNS, le géant pétrolier français Total avait annoncé qu’il allait étendre un programme d’exploration de gaz naturel en off-shore à Chypre, et ce après que les précédentes opérations de recherche en hydrocarbures  se soient  soldées par des échecs. C’est en effet ce qu’avait alors indiqué le ministre chypriote de l’Energie George Lakkotrypis, lors de sa visite en Égypte, dans le cadre d’entretiens tenus au Caire dans le domaine énergétique,Chypre et Egypte étant fortement liés sur ce dossier.

En septembre dernier, une immense réserve de gaz naturel – Zohr –  a été découvert au large des côtes égyptiennes par le géant pétrolier italien Eni, faisant craindre à Chypre que son exploitation ne diminue fortement à terme la demande de l’Egypte en gaz naturel chypriote.

Certes, les responsables égyptiens avaient tenu alors à rassurer Chypre face à ses préoccupations, insistant sur le fait qu’ils conservaient un vif intérêt pour l‘importation de gaz issu du champ chypriote dénommé Aphrodite.
Alors que les ressources en hydrocarbures situées au large de Chypre et d’Israël pourraient être un des enjeux de tout premier ordre dans la guerre du pétrole et du gaz à laquelle se livrent actuellement les grandes puissances mondiales, Nicosie et Le Caire ont  en effet signé en février dernier un protocole d’accord qui pourrait conduire le gouvernement chypriote à approvisionner en gaz son voisin égyptien via un gazoduc sous-marin (off-shore). Un tel projet permettrait en tout premier lieu à l’Egypte de solutionner son problème de pénurie énergétique, tout en offrant à Chypre la possibilité de s’affranchir d’une éventuelle tutelle financière russe, européenne, ou américaine. Voire israélienne.
Mais si Chypre souhaite réaliser des travaux d’exploration dans le champ gazier Aphrodite  récemment découvert au large du sud-est de l’île, ses réserves estimées ne sont pas assez importantes pour permettre à l’Etat chypriote de développer ses propres infrastructures d’exportation sur la terre ferme.

C’est fort d’un tel constat, que l’accord conclu en hiver dernier autorise la holding gouvernementale égyptienne Egas et la Compagnie nationale d’hydrocarbures chypriote à examiner des solutions techniques pour transporter le gaz naturel à travers un pipeline off-shore reliant directement le champ d’Aphrodite au territoire égyptien.
Rappelons que le champ Aphrodite découvert en 2011 par la compagnie américaine Noble Energy contiendrait, selon les estimations, entre 100 et 170 milliards de m3 de gaz. Des niveaux de réserves insuffisants pour pouvoir rentabiliser le projet d’usine de gaz naturel liquéfié à Vassiliko, près de la ville côtière de Limassol.

– La Méditerranée orientale : un secteur gazier prometteur … et convoité –

A noter que les recherches de Eni-Kogas et de Total s’intègrent dans une série de travaux de prospection et de production de pétrole menées par des entreprises internationales, incluant BP et ConocoPhillips, lesquelles ont réduit les budgets 2015 suite à la baisse des prix pétroliers. La compagnie américaine Noble Energy a pour sa part trouve des réserves de gaz dans la zone en 2011.

Mais la donne a quelque peu changé depuis ces dernières semaines suite à l’annonce faite par Eni de la découverte du champ d’hydrocarbures, baptisé Zohr, lequel s’étend sur environ 100 km2 et pourrait contenir jusqu’à 850 milliards de mètres cubes de gaz. Plus encore, début septembre, le groupe énergétique italien a déclaré qu’il était prêt à céder une part de l’immense gisement de gaz naturel qu’il a découvert au large de l’Egypte. Volonté affichée : financer le développement de ce champ sans sacrifier ses dividendes.

Dans une interview accordée au quotidien italien La Republicca, l’administrateur délégué Claudio Descalzi n’avait pas alors exclu une éventuelle cession de certains lots, qui pourrait permettre de « donner de la valeur et de la solidité au bilan financier » du groupe.

Elisabeth Studer – 28 décembre 2015 – www.leblogfinance.com


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