par Laetitia Volga
PARIS, 8 décembre (Reuters) – Les grandes banques centrales et les tractations sur le Brexit seront dans le viseur des investisseurs ces prochains jours avec plusieurs réunions de politique monétaire à l’agenda, dont celle de la Réserve fédérale (Fed), et la tenue d’un sommet européen.
La semaine à venir s’annonce comme la dernière séquence chargée d’une année 2017 largement favorable aux actifs risqués en dépit de multiples risques politiques. L’adoption du projet de réforme fiscale aux Etats-Unis par les sénateurs américains le week-end dernier a néanmoins déjà permis de lever une incertitude pesante pour les opérateurs de marché en cette fin d’année.
L’optimisme des investisseurs sur la mise en oeuvre de cette réforme, qui prévoit de réduire drastiquement l’impôt sur les sociétés américaines, a galvanisé le dollar, en passe d’afficher un gain de plus de 1% sur la semaine face à un panier de devises de référence.
Le billet vert a été aussi soutenu par la prolongation de l’accord de financement du gouvernement fédéral des Etats-Unis jusqu’au 22 décembre, et par la publication d’un chiffre de créations d’emplois supérieur aux attentes en novembre.
COMBIEN DE HAUSSE DE TAUX DE LA FED EN 2018 ?
Le rebond du dollar pourrait encore être renforcé par la réunion de deux jours de la Fed, prévus les 12 et 13 décembre. Pour le marché, peu de place au doute : une hausse, mercredi, d’un quart de point de pourcentage des taux est plus que probable.
La présidente de la Fed, Janet Yellen, et Jerome Powell, qui devrait prendre sa succession en février prochain, se sont récemment montrés favorables à un nouveau tour de vis de l’institution.
Il s’agirait de la cinquième hausse depuis le début du cycle de normalisation entamé en décembre 2015.
Ce sont surtout les mots choisis par la Réserve fédérale et sa présidente pour évoquer le rythme de resserrement monétaire en 2018 qui intéresseront les marchés.
Une majorité des économistes interrogés par Thomson Reuters anticipent désormais une accélération progressive du resserrement monétaire avec trois nouvelles hausses des taux en 2018 – des anticipations en ligne avec les prévisions de la Fed – contre deux attendues lors d’une précédente étude.
Pour Christophe Donay, responsable de l’allocation d’actifs et de la recherche macroéconomique de Pictet Wealth Management, la politique monétaire de la Fed devrait néanmoins rester accommodante malgré la normalisation en cours.
“Les politiques des banques centrales n’ont pas réussi à générer des niveaux de croissance et d’inflation suffisants pour justifier une approche autre que très prudente de la normalisation, après des années de largesse monétaire”, estime-t-il.
SOULAGEMENT APRÈS L’ACCORD SUR LE BREXIT
En Europe, les investisseurs seront attentifs aux avancées des pourparlers sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, après l’accord trouvé vendredi entre Londres et Bruxelles sur les modalités de leur divorce.
Cet accord était indispensable pour mettre le Brexit au menu du sommet européen prévu les 14 et 15 décembre et ouvrir ainsi la voie à une deuxième phase des négociations, consacrée aux discussions sur la période de transition après le Brexit, prévu en mars 2019, et sur les futures relations commerciales entre le Royaume-Uni et l’UE.
“Cela réduit le risque extrême d’un scénario sans accord et d’une rupture complète des négociations”, souligne Viraj Patel, responsable de la stratégie taux d’ING.
L’annonce de cet accord a ainsi fait chuter l’euro à un plus bas de six mois face à la livre sterling et fait grimper les rendement des obligations d’Etat britanniques.
Les opérateurs de marché resteront néanmoins attentifs à une salve d’indicateurs attendus dans les prochains jours au Royaume-Uni sur l’inflation, la consommation et l’emploi, en amont de la décision de politique monétaire de la Banque d’Angleterre (BoE).
Après la hausse des taux opérée en novembre, la BoE devrait observer le statu quo lors de son réunion du 14 décembre, de même que la Banque centrale européenne (BCE) dont la grande messe est prévue le même jour.
QUEL AVENIR POUR LE QE DE LA BCE ?
Les investisseurs devraient suivre avec attention la conférence de presse du président de la BCE, Mario Draghi, à la recherche d’indications sur la future trajectoire que pourrait prendre l’institution en matière de politique monétaire.
“Il est improbable que la BCE modifie ses prévisions à court terme provoquant des anticipations prématurées d’une première hausse des taux, en dépit des déclarations de plusieurs gouverneurs prônant plus de flexibilité”, estiment les économistes de Société Générale.
La BCE a annoncé fin octobre qu’elle réduirait ses achats de titres à 30 milliards d’euros par mois à partir de janvier et jusqu’en septembre prochain, contre 60 milliards actuellement, dans le cadre de son programme d’assouplissement quantitatif.
Mario Draghi a fait savoir que la prolongation de cet outil non-conventionnel était un élément clé permettant de repousser les anticipations de hausse des taux à un avenir plus lointain.
Selon une enquête Reuters, une majorité d’économistes estiment que la fin de l’assouplissement quantitatif de la BCE interviendra au plus tard en décembre 2018 mais quelques-uns s’attendent à une prolongation jusqu’à la mi-2019.
“Bien que la BCE réduise drastiquement la voilure en terme de rachat de titres, il est important de rappeler qu’en continuant de gonfler la taille de son bilan, son orientation reste accommodante à une étape tardive du cycle économique”, font observer les économistes de Société Générale.
Ces derniers craignent que la BCE tarde à arrêter son programme d’assouplissement quantitatif et ne soit contrainte d’accélérer la normalisation de sa polique monétaire à un rythme plus rapide que prévu par les marchés. (édité par Blandine Hénault)