par Madeline Chambers
BERLIN, 8 décembre (Reuters) – Annegret Kramp-Karrenbauer, présidente de l’Union chrétienne démocrate (CDU) de la chancelière Angela Merkel, a vivement critiqué dimanche la volonté du Parti social démocrate (SPD) de tirer vers la gauche la politique mise en oeuvre par leur coalition, accusant ses nouveaux dirigeants de penser davantage à eux-mêmes qu’à l’Allemagne.
Conservateurs et sociaux-démocrates doivent se prononcer dans les prochaines semaines sur l’avenir de leur coalition après l’accession à la tête du SPD d’un tandem issu de l’aile gauche du parti, Norbert Walter-Borjans et Saskia Esken. Outre son changement de direction, le SPD a dans le même temps réclamé l’ouverture de discussions avec la CDU sur des mesures plus ambitieuses de lutte contre le réchauffement climatique, sur un relèvement du salaire minimum et sur des investissements dans les infrastructures.
Annegret Kramp-Karrenbauer, proche de la chancelière, reproche au SPD de ne pas affirmer clairement son attachement à la coalition au pouvoir, même si elle ne va pas jusqu’à rejeter directement ses demandes.
“Tout comme on ne peut pas être un petit peu enceinte, on ne peut pas être un petit peu au pouvoir”, a-t-elle dit au journal Bild am Sonntag.
La CDU reste fidèle à l’accord de coalition entre les deux partenaires, a-t-elle déclaré, et elle en attend de même du SPD.
“C’est mauvais pour l’Allemagne si chaque décision importante dépend des sentiments intimes du SPD”, a poursuivi Annegret Kramp-Karrenbauer. “Cette coalition est pour le pays, et pas une thérapie post-traumatique pour les partis au pouvoir.”
SOURCES DE CONFLIT
Un éclatement de la coalition au pouvoir depuis un an et demi à Berlin aboutirait soit à la formation d’un gouvernement minoritaire soit à de nouvelles élections législatives. Cela ouvrirait une période d’incertitude pour la première puissance économique d’Europe alors que CDU et SPD doivent faire face à la montée en puissance des Verts et du parti d’extrême droite Alternative für Deutschland (AfD).
Parmi les sources potentielles de conflit entre la CDU et le SPD, les nouveaux dirigeants sociaux-démocrates réclament un programme d’investissements de 450 milliards d’euros sur 10 ans dans les infrastructures, les écoles et la révolution numérique.
Si le SPD ne va pas jusqu’à demander au gouvernement de renoncer à son objectif de budget à l’équilibre sans émission de dette nouvelle, il souhaite une approche plus souple, ce que semble exclure Annegret Kramp-Karrenbauer.
“Il est hors de question d’émettre de la dette nouvelle”, a-t-elle dit à l’édition dominicale du journal Frankfurter Allgemeine Zeitung.
“S’il y a trop peu d’investissements, ce n’est pas par manque d’argent, c’est parce que l’argent qui existe s’écoule trop lentement.”
Annegret Kramp-Karrenbauer rejette aussi l’idée d’une hausse du salaire minimum, jugeant que cette question relève d’une commission indépendante et pas des responsables politiques.
Sur le climat, la présidente de la CDU n’entend pas rouvrir le dossier alors que les conservateurs et les sociaux-démocrates se sont entendus en septembre sur un ensemble complexe de mesures pour que l’Allemagne respecte ses objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Il peut néanmoins exister des marges de manoeuvre sur ce thème, d’autant que les Verts bloquent ce texte sur le climat au Bundesrat, la chambre haute du parlement allemand. (version française Bertrand Boucey)