L’épargne supplémentaire accumulée par les Français depuis que la crise du Covid a débuté a été massive, mais très inégalement répartie. Dans une récente étude, l’Insee remonte aux sources de ces inégalités.
165 milliards d’euros : c’est, selon les projections de la Banque de France, le total de l’épargne supplémentaire que les Français auront accumulé d’ici la fin 2021 en raison du Covid. Une épargne de crise, consécutive du recul de la consommation liée aux restrictions sanitaires, et au réflexe de thésaurisation de Français inquiets pour l’avenir.
Quel est le profil de ces Français ayant « surépargné » depuis un an ? Dans le cadre de ses notes de conjoncture, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) vient de consacrer un dossier au sujet, s’appuyant sur des données bancaires anonymisées fournies par le Crédit Mutuel. Son constat général est le suivant : tous les groupes de ménages ont connu une hausse de leur niveau de patrimoine financier en 2020.
Ce qui ne veut pas dire que tous les Français, loin de là, ont pu mettre de l’argent de côté depuis un an. Au contraire : l’épargne Covid aussi révèle de fortes inégalités, autour de trois critères principaux.
1 – Le niveau de revenus
De 1 à 80 : c’est l’écart qui sépare les Français les plus et les moins aisés en matière d’épargne Covid. Pour le quart des Français détenant le patrimoine financier le plus important – « le dernier quartile » en langage statistique -, elle a ainsi représenté plus de 10 000 euros, en moyenne, en 2020. Contre seulement 218 euros, toujours en moyenne pour le premier quartile, celui des ménages les plus démunis en patrimoine. Ces 218 euros, toutefois, représentent une hausse de plus de 30% de leur patrimoine, contre 6% seulement pour les 10 000 euros du dernier quartile.
L’explication de cet écart est assez simple à comprendre. « Les catégories socioprofessionnelles aux revenus plus élevés, comme les cadres, ont davantage diminué leur consommation que les ouvriers ou les employés », note l’Insee. Chez les seconds en effet, la part des dépenses fléchées vers les produits de première nécessité, qui sont restés disponibles pendant les deux confinements, est beaucoup plus importante que chez les premiers.
2 – L’âge
Dans son analyse, l’Insee constate également un rôle joué par l’âge. « Le patrimoine financier des ménages plus jeunes, dont la personne de référence a moins de 40 ans, a en moyenne moins augmenté (en euros) que celui des ménages dont la personne de référence a plus de 40 ans ». Là encore, c’est logique : on trouve dans les ménages d’âge moyen (40-60 ans) plus de salariés à hauts revenus – de cadres notamment – et plus de salariés en CDI. Deux caractéristiques qui leur ont permis de mieux amortir les effets de la crise.
Quant aux ménages de plus de 60 ans, souvent à la retraite, leur patrimoine a, dans un premier temps, été affecté par la crise, plus que d’autres catégories, en raison de la chute des valeurs boursières en mars 2020, auxquels ils sont plus exposés. Le rebond de la bourse leur a toutefois rapidement permis d’épargner à nouveau.
3 – La catégorie socio-professionnelle
La crise engendrée par la pandémie de Covid n’affecte pas tous les travailleurs de la même manière. Au sein de la population active, l’Insee a ainsi pu détecter des professions dont le patrimoine a moins augmenté que la moyenne des Français. C’est le cas, notamment, des artisans et des commerçants, directement affectés par la baisse de la consommation liée aux restrictions sanitaires, mais aussi des salariés du privé en général par rapport à ceux du public.
Parmi tous les actifs, ce sont toutefois les ouvriers qui ont été le plus sévèrement touchés par la crise, et qui ont donc peu, voire pas épargné. Ils cumulent en effet plusieurs caractéristiques particulièrement défavorables : moins de patrimoine au départ ; moins de revenus, et donc de marges de manœuvres budgétaires ; et moins d’emplois stables, avec une forte proportion d’intérimaires.