Évolution de la fiscalité française sur l’épargne

Le gouvernement français anticipe une hausse des impôts à partir de l’année prochaine. Cette augmentation est motivée par la nécessité de gérer efficacement les finances publiques, de contenir le déficit budgétaire et de satisfaire les exigences de Bruxelles. Les discussions parlementaires actuelles concernant le budget 2025 sont au cœur de cette initiative, révélant une stratégie centrée sur la recherche de nouvelles sources de revenus fiscaux.

Les contribuables les plus aisés et les grandes entreprises sont principalement visés par ces nouvelles mesures fiscales. Parmi les propositions en débat figurent une surtaxe sur les hauts revenus, un nouvel impôt pour les milliardaires, un durcissement du Pacte Dutreil, un renforcement de l’« exit tax » et une augmentation du prélèvement forfaitaire unique (PFU), aussi connu sous le nom de « flat tax ». Bien que ces propositions soient encore en discussion, elles suscitent d’ores et déjà de vives préoccupations parmi les contribuables concernés.

La France se distingue par une fiscalité lourde, notamment en ce qui concerne la taxation de l’épargne. Cette situation est régulièrement confirmée par diverses études comparatives. La dernière édition du baromètre de la fiscalité de l’épargne et du financement des entreprises, publiée le 28 octobre par l’Amafi (Association française des marchés financiers), réaffirme cette observation.

La réforme de la taxation de l’épargne de 2018 a significativement modifié le paysage fiscal français. Cette réforme a introduit un prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 12,8 % sur le revenu, additionné à 17,2 % de prélèvements sociaux, formant ainsi une « flat tax » de 30 %. Selon Stéphane Giordano, président de l’Amafi, cette réforme a permis d’aligner la France sur la moyenne européenne, tout en évitant de créer des avantages disproportionnés pour les contribuables. Cette réforme visait à mettre fin à des taux d’imposition du capital exceptionnellement élevés en France par rapport à ceux de ses voisins européens.

Sous la présidence d’Emmanuel Macron, la suppression de l’ISF au profit de l’IFI avait pour objectif d’encourager les contribuables les plus fortunés à investir dans l’économie française. Cette mesure cherchait à corriger les effets d’une fiscalité dissuasive instaurée en 2012 sous le quinquennat de François Hollande. Cette fiscalité avait notamment freiné la distribution de dividendes par les entreprises, qui préféraient conserver leurs bénéfices en trésorerie, ce qui avait entraîné une diminution du rendement fiscal.

Malgré la mise en place du PFU, la France continue d’afficher l’un des niveaux de taxation de l’épargne les plus élevés en Europe. En 2022, les prélèvements obligatoires sur le capital en France représentaient 2 points de PIB de plus que la moyenne européenne et 3 points de plus qu’en Allemagne. Le taux implicite d’imposition du capital en France reste également le plus élevé d’Europe, atteignant 60 % en 2020, contre 40 % en Belgique et 31,5 % en Italie.

Le taux implicite d’imposition du capital est un indicateur crucial pour évaluer la compétitivité fiscale d’un pays. Il est calculé en rapportant le produit des prélèvements obligatoires sur le capital (incluant les revenus, la détention et la transmission) au montant des revenus du capital. Selon un rapport de la Commission européenne publié en 2022, ce taux est le plus élevé en France parmi les onze pays européens étudiés.

Les économistes de l’association Fipeco précisent que ces revenus ne sont pas toujours imposables et peuvent être mal connus. La comptabilité nationale, utilisée par la Commission européenne pour ses estimations, offre des données harmonisées entre les pays mais ne prend pas en compte les plus-values et moins-values dans les revenus. De plus, les revenus financiers perçus par les entreprises et reversés à d’autres entreprises nécessitent une consolidation des opérations.

Avant l’introduction du PFU, la France était nettement moins attractive que ses voisins européens en termes de fiscalité du capital. En 2017, son taux implicite de taxation du capital était de 53,1 %, tandis que près de la moitié des pays européens avaient un taux inférieur à 20 % et seulement quatre pays affichaient des taux compris entre 30 % et 37 %. Aucun autre État membre de l’Union européenne n’atteignait un taux supérieur à 38 %.

L’introduction de la flat tax en 2018 n’a pas radicalement changé cette dynamique. Le taux implicite d’imposition du capital en France reste le plus élevé d’Europe, atteignant 60 % en 2020. Toutefois, ce constat n’est pas entièrement négatif. Selon l’Amafi, l’augmentation des prélèvements sur le capital en France s’explique en partie par le dynamisme des revenus fiscaux liés au patrimoine des ménages.

La création du PFU a stimulé les distributions de dividendes, augmentant la manne fiscale. Depuis la réforme de 2018, le montant des dividendes imposables a atteint environ 24 milliards d’euros par an, soit une augmentation de près de 70 % par rapport aux années précédentes. Cette évolution montre que la flat tax s’est largement autofinancée, contredisant les craintes initiales de perte de revenus fiscaux.

Raboter ou supprimer la flat tax dans le budget 2025 serait jugé contre-productif par de nombreux experts. Stéphane Giordano, dans le baromètre fiscal 2024 de l’Amafi, plaide pour une stabilité fiscale. Il souligne que cette stabilité est indispensable pour encourager les investisseurs à s’engager dans le financement à long terme des entreprises, ce qui est crucial pour l’innovation, la compétitivité et la création d’emplois.

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