Reste qu’encore une fois, en ce toute période électorale où l’emploi demeure un sujet particulièrement sensible, cette nouvelle qui pourrait sembler pour le moins satisfaisante à première vue, pourrait ni plus ni moins qu’un effet d’annonce concocté par l’équipe de communicants qui entourent le nouveau locataire de l’Elysée.
Car si les deux constructeurs affirment vouloir doubler leur commande pour l’un et fortement l’augmenter pour l’autre, aucune notion de temporalité n’a été associée. Il n’est pas complètement irraisonnée de penser qu’au final ils ne pourraient bien que regrouper voire anticiper leurs achats … l’objectif final étant de rendre la mariée plus belle à quelques semaines des législatives et à quelques jours d’une décision judiciaire sur l’avenir de l’entreprise. Bruno Le Maire n’aurait alors obtenu de la part des groupes automobiles qu’ils financent le coût de stockage, ce qui est nettement différent … Plus encore, les constructeurs auraient pu accepter d’autant plus facilement que ces commandes anticipées leur permettraient de pallier une éventuelle pénurie de pièces dans le cas ou l’entreprise se verrait contrainte de mettre la clé sous la porte. Dans cette hypothèse, ils auront pu ainsi tout simplement commander le volume de pièces nécessaire pour ne pas tomber en rupture, le temps de contractualiser avec d’autres fournisseurs.
Dans un communiqué publié dimanche,Bercy a ainsi indiqué que le ministre de l’Economie s’était entretenu durant le week-end avec le PDG de Renault, Carlos Ghosn, et le président du directoire de PSA, Carlos Tavares. « Il leur a demandé de s’engager sur un montant de commandes supplémentaires permettant la continuité de l’exploitation de l’entreprise et la poursuite des discussions avec les repreneurs », précise le texte. PSA s’est ainsi engagé à augmenter ses commandes de 10 à 12 millions d’euros. Renault s’est engagé pour sa part à doubler ses commandes pour les porter de 5 à 10 millions d’euros.
Grâce aux engagements des deux constructeurs, le niveau de chiffre d’affaires sur 2017 devrait approcher 25 millions d’euros si l’on en croit les calculs de Bercy. Permettant alors – toujours selon le Ministère – d’assurer la continuité de l’exploitation et la poursuite des discussions sur la reprise de l’entreprise. Dans un entretien accordé au journal La Montagne samedi 20 mai, l’avocat des GM&S, Maître Borie, expliquait néanmoins pour sa part que 40 millions d’euros de chiffre d’affaires étaient nécessaires pour pouvoir maintenir l’effectif à l’équilibre, et donc conserver tous les emplois. « Il y a un budget envisageable sur un maintien à 215 salariés, qui implique quand même un total de 35 millions d’euros de chiffre d’affaires au global, en comptant un minimum d’augmentation de prix et de volume de Peugeot et la même chose de Renault », précisait encore Maître Borie.
Vendredi, Bruno Le Maire avait promis aux représentants syndicaux du site de la Souterraine, reçus à Bercy, de « déployer tous les efforts nécessaires » auprès des deux groupes industriels – d’ici au 23 mai. Date à laquelle le tribunal de commerce de Poitiers doit se prononcer sur une éventuelle liquidation de l’entreprise qui emploie 277 salariés à l’heure actuelle. Les syndicats espèrent que le tribunal repoussera sa décision d’un mois pour laisser aux repreneurs potentiels, GMD et Magneto, le temps de formuler une offre. D’ici là les législatives seront passées …
Néanmoins, Bruno Le Maire a tenu à rappeler ce qu’il avait déclaré lors de l’intersyndicale le 19 mai dernier, que « l’entreprise devra adapter son organisation afin de gagner davantage en compétitivité. » Dans une lettre que les syndicats ont adressée à Bruno Le Maire le lendemain de leur entrevue, ils ont quant à eux rappelé au ministre que les constructeurs n’avaient à aucun moment évoqué l’ »adaptation de [l]‘entreprise aux conditions et standards de la concurrence » et qu’ils restaient « demandeurs d’éléments précis sur ces sujets ». Ajoutant que depuis le début de l’année, ils avaient demandé à accéder aux données compilées sur la PFA (Plateforme de la Filière Automobile) pour pouvoir comparer les performances industrielles de l’entreprise à celles des autres acteurs, sans toutefois obtenir de réponses.
Les syndicats ont d’ores et déjà prévenus le Ministère. Dans le cas où cette « adaptation » consisterait « à appliquer des ratios de chiffre d’affaires par salariés, sur la seule base de ce que concéderaient PSA et Renault en production sur des fins de séries », cette « approche ne peut pas être satisfaisante ». Ajoutant : « sauf si vous souhaitez nous revoir pour les mêmes raisons dans deux ans. »
Sources : AFP, Reuters, Ministère de l’Economie, Le Populaire, La Montagne
Elisabeth Studer – 21 mai 2017 – www.leblogfinance.com