L’emploi victime de la fin annoncée du diesel. Le groupe japonais Ibiden va fermer son usine de filtres à particules située dans le Loiret, à Courtenay en raison de la baisse des véhicules dotés de ce type de motorisation. 400 emplois sont sur la sellette.
Lors d’une réunion extraordinaire du comité d’entreprise, jeudi à Montargis, la direction de l’équipementier a malheureusement confirmé aux représentants du personnel son intention de se “désengager du site”.
L’usine victime du déclin du diesel
L’entreprise subit de plein fouet la baisse des ventes de véhicules diesel. Alors que ce type de motorisation représentait encore en 2013 les trois quarts du parc automobile français, il est passé en 2017 sous la barre des 50% des immatriculations de véhicules neufs.
Une situation fort dommageable pour l’usine de Courtenay. Les pertes du site ont été évaluées à 5,5 millions d’euros en 2015 et 7 millions en 2016.
Une production non conforme aux nouvelles normes
S’exprimant dans le cadre d’un communiqué, la direction a indiqué que l’entreprise produisait des filtres à basse porosité ne correspondant plus aux nouvelles normes anti-pollution. Elle estime que la demande pour ses produits devrait chuter “de 45% dans les trois prochaines années”.
Elle considère par ailleurs comme non rentable un éventuel investissement dans une modernisation de ses lignes afin de produire des filtres à haute porosité. En effet, selon elle, l’effondrement annoncé des ventes de véhicules diesel “sans aucun rebond attendu dans les décennies à venir” ne l’encourage pas à agir en ce sens.
En conséquence, “l’hypothèse de reconditionner les lignes actuelles se traduirait par des pertes d’exploitation significatives qui rendraient inopérants les investissements nécessaires à cette transformation”. Un tel scénario pourrait au final ne faire qu’aggraver la situation, l’entreprise étant alors confronté à une hausse des charges qu’aucune hausse du chiffre d’affaires ne pourrait compenser.
Une dépendance trop forte par rapport à son client unique : PSA
Le site Ibiden souffre également de sa dépendance par rapport à son client unique que représente le groupe PSA.
Si en 2012, il avait été question de fabriquer des produits pour le groupe Renault-Nissan, le projet aurait nécessité 7 millions d’euros … une somme trop importante pour que cela ait pu aboutir.
L’emploi sur la sellette
Ibiden emploie environ 300 personnes en contrat à durée indéterminé (CDI) et une centaine d’intérimaires dans l’usine ouverte en 2001.
Ces derniers mois Ibiden avait déjà supprimé des postes, l’usine employait ainsi plus de 400 personnes l’an passé.
L’équipementier concurrent de Faurecia n’a pas encore fourni de date pour la fermeture du site. Il assure toutefois qu’il va procéder à la recherche d’un repreneur et que des discussions seront engagées en parallèle sur le plan social à venir.
Projet de délocaliser en Hongrie
En 2016, l’usine de Courtenay avait d’ores et déjà échappé de peu à une délocalisation de sa production vers la Hongrie. Le groupe japonais y détient une usine ultra-moderne qui produit des filtres à particule de nouvelle génération, plus respectueux de l’environnement.
La direction avait alors cédé à la pression du personnel qui avait obtenu le report du projet jusqu’en 2020. Il ne s’agissait au final que d’un sursis.
Les salariés, relayé par le sénateur (PS) Jean-Pierre Sueur, dénoncent à nouveau aujourd’hui une délocalisation de la production vers l’usine hongroise.
Le Président de Région plaide pour une réorientation du site
Dans un communiqué, François Bonneau, président de la Région Centre-Val de Loire, condamne ”cette décision unilatérale « qu’il estime « dramatique pour les 320 salariés concernés, leurs familles et dévastatrice pour le tissu économique de ce territoire”. Il “déplore qu’aucune recherche de solution n’ait été envisagée pour ce site, alors même que des opportunités de restructuration auraient dû être étudiées notamment pour la fabrication de filtres nouvelle génération.”
Si le président PS de la Région Centre Val-de-Loire, François Bonneau ne conteste pas l’analyse du contexte économique faite par l’équipementier, il estime toutefois que l’entreprise devrait étudier la possibilité de maintenir l’activité de l’usine en y affectant un autre type de production, en la ré-orientant vers des domaines plus porteurs.
Compte-tenu de « l’engagement des salariés pour le développement de cette entreprise et l’accompagnement que les collectivités locales ont fait pour son implantation, il aurait ainsi »trouvé logique et légitime que l’investisseur cherche à placer là un produit qui correspondrait au marché de demain » ajoute-t-il.
La Région demande une restitution des sommes qu’elle a engagées
Alors que la Région a notamment versé à Ibiden 533 000 euros lors de la création de l’entreprise en 2002 et en 2014, 68 000 euros au titre de la formation, elle compte bien ne pas se faire rouler dans la farine.
“En contrepartie de cette dernière aide de la Région Centre-Val de Loire, la société Ibiden DPF France s’était engagée à maintenir l’emploi pendant 5 ans à Courtenay » tient-il à rappeler.
L’entreprise n’ayant pas respecté ses engagements, François Bonneau a d’ores et déjà averti qu’il allait demander une restitution des sommes engagées par la Région afin que les salariés « en bénéficient directement pour leur reconversion ».
« Il va falloir maintenant, de la part d’Ibiden, un plan social hyper-exigeant et nous allons y travailler » a-t-il martelé.
Jean-Pierre Sueur, sénateur du Loiret, a indiqué pour sa part qu’il avait fait part au Premier ministre, Édouard Philippe, “du grand préjudice que représenterait la suppression de ces emplois pour les salariés eux-mêmes, ainsi que pour la ville de Courtenay et la Communauté de communes qui perdraient alors de nombreux emplois, un potentiel industriel ainsi que de précieuses ressources.”
Il a également tenu à rappeler qu’il y a plusieurs années la direction avait demandé à ses cadres et salariés “de gros efforts” pour produire de nouveaux filtres conformes aux nouvelles réglementations, comme condition du maintien de la production à Courtenay. “La fermeture de cette entreprise ou la délocalisation de sa production vers d’autres pays d’Europe seraient d’autant plus incompréhensibles que ces efforts importants ont été accomplis » ajoute-t-il enfin.
Sources : AFP, France Bleu, République du Centre
Elisabeth Studer, le 17 novembre 2018
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