Les prix du tin sur le marché londonien ont franchi pour la première fois en 15 mois la barre des 28 026 euros la tonne métrique, poursuivant ainsi la hausse amorcée début 2024. Cette envolée s’inscrit dans un contexte de forte demande mondiale et d’incertitudes sur l’offre.
Le contrat de référence à trois mois sur le London Metal Exchange (LME) a atteint 29 642 euros la tonne, son plus haut niveau depuis janvier 2023. Sur le marché chinois, le contrat le plus échangé pour livraison en mai a également bondi de 5,3%, atteignant 250 810 yuans (soit 32 377 euros) la tonne.
Cette flambée des prix s’explique par la baisse significative des stocks de tin sur le LME, qui ont chuté à 4 285 tonnes, soit leur plus bas niveau depuis juillet 2023. Depuis le début de l’année, les stocks ont diminué de manière spectaculaire, de 44%, soulignant les tensions sur l’offre.
À l’inverse, en Chine, premier consommateur mondial de tin, les stocks dans les entrepôts suivis par la Bourse des futures de Shanghai ont atteint un niveau record de 12 823 tonnes la semaine dernière, reflétant des dynamiques de marché différentes entre la Chine et le reste du monde.
Cette envolée des cours du tin intervient également après la décision de l’Indonésie, deuxième producteur mondial, de relancer ses activités minières. Le gouvernement a accordé de nouvelles quotas de production, prévoyant l’extraction de plus de 40 000 tonnes de tin cette année.
Au-delà des fondamentaux spécifiques au tin, cette hausse s’inscrit dans un mouvement plus large de progression des cours des métaux de base, les investisseurs ayant couvert leurs positions courtes avant la publication des récentes données sur l’inflation aux États-Unis.
Tin, un métal stratégique pour la transition énergétique
Le tin, dont les cours atteignent des niveaux inédits depuis plus d’un an, se trouve à un tournant critique, confronté à des défis d’approvisionnement dans un contexte de transformation industrielle majeure, qualifiée de “Grande Électrification”.
Utilisé depuis l’âge du Bronze, le tin joue aujourd’hui un rôle essentiel dans de nombreux secteurs, de la soudure à l’électronique en passant par les batteries. Avec près de la moitié de la demande mondiale, la soudure demeure son principal débouché, notamment depuis l’interdiction du plomb en 2006.
Mais cette demande croissante, tirée par l’essor du numérique, se heurte à des contraintes d’offre. La production mondiale de tin reste en effet très concentrée, 75% provenant de seulement quatre pays : Chine, Indonésie, Myanmar et Afrique.
De plus, l’industrie minière fait face à des défis, entre baisse des teneurs des minerais et adoption de méthodes d’extraction non conventionnelles, comme le dragage offshore en Indonésie. La raréfaction des réserves à haute teneur et la hausse des coûts d’extraction rendent difficile le maintien des niveaux de production primaire.
Face à ces contraintes d’approvisionnement, le recyclage du tin prend une importance cruciale pour combler l’écart entre l’offre et la demande. Mais même les capacités de recyclage peinent à suivre les besoins, notamment dans un contexte de transition énergétique mondial.
Bien que certains analystes évoquent un possible retournement de tendance, le tin semble appelé à demeurer au cœur des enjeux de l’électrification, soulevant des questions sur la capacité de l’offre à suivre la cadence de cette transformation.