Le Maroc et l’Espagne mettent officiellement fin à la crise diplomatique entre les deux Royaumes

Après un an de crise diplomatique, l’Espagne et le Maroc ont normalisé leurs relationsà la faveur d’un geste de soutien réclamé de longue date par Rabat à Madrid sur le dossier hautement sensible du Sahara occidental.

“Aujourd’hui, nous entamons une nouvelle étape dans notre relation avec le Maroc basée sur le respect mutuel, le respect des accords, l’absence d’actions unilatérales et la transparence et la communication permanente”, a écrit le gouvernement espagnol dans un communiqué.

Cette annonce intervient après la publication d’un communiqué du palais royal marocain faisant état d’un message du Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, indiquant que le plan marocain “d’autonomie” pour le Sahara occidental est “la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution du différend”.

Une position que n’avait jamais défendue auparavant Madrid, qui a toujours prôné la neutralité entre Rabat et les indépendantistes sahraouis du Polisario.

Si le gouvernement espagnol ne reprend pas, dans son communiqué, ce message et ne dit mot du Sahara, il le confirme implicitement en soulignant que cette “étape se déroulera dans le cadre d’une feuille de route claire et ambitieuse comme l’indiquent les communiqués du gouvernement du Maroc”.

Dans le cadre de la normalisation des relations entre les deux pays, une visite de Pedro Sanchez au Maroc, dont la date n’a pas été communiquée, est programmée tandis que le chef de la diplomatie espagnole, José Manuel Albares, se rendra lui à Rabat “avant la fin du mois”, dit le communiqué du gouvernement espagnol.

Madrid “a cédé”

Pour Ignacio Cembrero, journaliste espagnol spécialiste des relations entre les deux pays, “le gouvernement espagnol a cédé à la principale exigence du Maroc” qui lui demandait de “soutenir sa proposition d’autonomie” du Sahara occidental.

“C’est un changement important” car “le Maroc exige que cela soit rendu public” mais “les autorités espagnoles ont toujours aidé le Maroc (sur ce dossier) ces dernières années” dans la discrétion, nuance-t-il.

Dans un communiqué, le ministère marocain des Affaires étrangères a salué “les positions positives et les engagements constructifs de l’Espagne au sujet du Sahara marocain”.

Le conflit du Sahara occidental, ex-colonie espagnole considérée comme un “territoire non autonome” par l’ONU, oppose depuis des décennies le Maroc aux indépendantistes sahraouis du Front Polisario, soutenus par Alger.

Rabat, qui contrôle près de 80 % de ce territoire, propose un plan d’autonomie sous sa souveraineté tandis que le Polisario réclame un référendum d’autodétermination, prévu lors de la signature en 1991 d’un cessez-le feu mais jamais concrétisé.

Crise migratoire à Ceuta

La brouille diplomatique majeure entre Madrid et Rabat avait été provoquée en avril 2021 par l’accueil en Espagne, pour y être soigné du Covid, du chef du Front Polisario, Brahim Ghali, ennemi juré de Rabat.

Elle s’est traduite en mai dernier par l’arrivée massive de migrants d’origine marocaine dans l’enclave espagnole de Ceuta, sur la côte nord du Maroc, profitant d’un relâchement de la surveillance des frontières côté marocain.

Avant les annonces de normalisation, les tensions s’étaient atténuées mais n’avaient pas pris fin. Rappelée pour consultations en mai, l’ambassadrice du Maroc en Espagne n’est toujours pas revenue à Madrid.

Selon Bernabé López, professeur d’études arabes et islamique à l’Université autonome de Madrid, ce geste de Madrid sur le Sahara a en particulier pour but d’obtenir de Rabat une gestion des flux migratoires. Afin “de serrer un peu la vis et qu’il y ait plus de contrôle et non cette absence intentionnée de contrôle de la part du Maroc”, juge-t-il.

En contrepartie de la reprise de ses relations diplomatiques avec Israël, le Maroc avait obtenu des États-Unis, alors dirigés par Donald Trump, la reconnaissance de “la marocanité” de l’ex-colonie espagnole.

La semaine dernière, Washington a réitéré son soutien à Rabat, en réaffirmant que son plan d’autonomie était “sérieux et crédible”.