Le président de Danone répond sans détours aux questions concernant sa stratégie, sa gouvernance et les résultats de son groupe. Cette interview a été réalisée le 8 janvier dernier au siège de Danone à Paris. L’arrivée du fonds activiste Bluebell au capital de l’entreprise et sa remise en cause de l’action d’Emmanuel Faber n’étaient pas encore connues, même si elles datent du mois de novembre 2020.
Challenges. Pourquoi votre positionnement sur la santé n’est-il pas un atout en période de pandémie?
Emmanuel Faber. Nos marques positionnées sur la santé sont en forme: Actimel a gagné 10% de ventes, et le redressement d’Activia est conforté. Les produits végétaux ont progressé de 15 à 20% et nous sommes cinq fois plus grands que nos concurrents internationaux dans ce domaine. Mais nos ventes d’eau en bouteilles souffrent de l’arrêt des déplacements et la fermeture des bars et restaurants. La crise nous a fait perdre 1 milliard d’euros de ventes. L’impact devises sur le 3e trimestre équivaut à l’évaporation de 2 milliards d’euros de ventes annuelles.
Vous misez sur les produits végétaux. N’avez-vous pas pris ce virage trop tôt?
Les consommateurs sont en train de diversifier leur alimentation comme jamais. Et cette pandémie a même accéléré le phénomène. En se positionnant sur ces marchés, Danone se pose comme un interlocuteur incontournable pour la grande distribution.
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Vous avez annoncé que vous allez cesser vos produits les moins rentables. Vous pourriez vous retirer de l’eau en bouteilles?
Nous allons supprimer 20% de nos références mondiales pour proposer des gammes plus courtes à la grande distribution et renouer avec une croissance plus rentable. Mais il n’est pas question de céder nos activités dans l’eau.
N’y a-t-il pas une contradiction entre votre discours social et écolo, et la nécessité de gagner de l’argent?
Nos actionnaires ont approuvé à 99% notre statut d’entreprise à mission. Ce n’est pas une utopie, c’est surveillé par un comité de mission d’experts présidé par Pascal Lamy. Avec notre plan Local First nous serons plus efficaces et plus proches des marchés. Nous passons d’une organisation pyramidale à une organisation neuronale en 12 mois.
Votre directrice générale Cécile Cabanis quitte son poste mais devient vice-présidente du Conseil d’administration. On a du mal à suivre.
Cécile a affirmé son soutien au projet de Danone mais elle souhaite ouvrir un nouveau cycle professionnel après 16 ans dans le groupe. Je lui ai demandé de rester au Conseil d’administration et qu’elle en soit la vice-présidente. C’est fort logique mais des commentateurs professionnels ont voulu voir des ruptures là où il n’y en avait pas. Nous avons une relation de confiance et il n’y a pas de désaccord entre nous.
Votre conseil d’administration vous soutient-il?
Les administrateurs ont été d’une extraordinaire solidarité avec l’entreprise depuis le début de la crise. Ils ont renoncé à leurs jetons de présence. Ils ne se sont jamais autant réunis et ont été unanimes pour adapter leur fonctionnement au contexte très particulier que vit le groupe.
Qui veut votre peau?
C’est un sujet qui ne m’intéresse pas. Danone est une entreprise unique, numéro un mondial des protéines végétales, des probiotiques et de l’immunité, coleader mondial de la nutrition spécialisée. Et nous sommes maintenant une entreprise à mission. Cela fait des envieux. Il y a des gens qui ont peut-être intérêt à ce que Danone déraille. Mais cela ne me fera pas changer de cap.