Dans un geste symbolique aux lourdes conséquences politiques, le Sénat français a rejeté jeudi la ratification de l’Accord économique et commercial global (CETA) entre l’Union européenne et le Canada. Avec 211 voix contre seulement 44 pour, les sénateurs ont refusé d’avaliser cet accord de libre-échange, cinq ans après son approbation controversée par l’Assemblée nationale en 2019.
Cette décision inattendue constitue un revers pour le gouvernement, qui n’avait pas anticipé la résurgence de ce dossier oublié depuis la suspension des travaux parlementaires liée à la pandémie de COVID-19. C’est le groupe communiste qui, profitant de sa journée d’initiative parlementaire, a remis ce texte sur le devant de la scène, dans un contexte de vives inquiétudes du monde agricole quant aux impacts des accords commerciaux.
Le ministre du Commerce extérieur, Franck Riester, a dénoncé une “manœuvre grossière” et une “manipulation inacceptable”, vantant les bienfaits du CETA pour l’économie et la filière agricole française. Cependant, les sénateurs ont reproché au gouvernement son “mépris” envers la Chambre haute, qui n’avait jamais été consultée sur ce dossier.
Au-delà des considérations procédurales, c’est sur le fond que le CETA a essuyé de vives critiques. Les groupes de gauche et Les Républicains ont pointé les risques pour l’agriculture nationale, la concurrence déloyale et les menaces environnementales. “Nous ne pouvons plus continuer à importer d’ailleurs ce que nous produisons chez nous”, a tonné le sénateur LR Laurent Duplomb.
Bien que ce vote soit essentiellement symbolique, puisque le gouvernement n’est pas tenu d’en informer les institutions européennes, il envoie un signal fort à Bruxelles au moment où se négocient d’autres accords commerciaux controversés comme le Mercosur. Les communistes promettent d’inscrire le CETA à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale fin mai, à quelques jours des élections européennes, maintenant la pression sur l’exécutif.