Après l’effervescence générée par les Jeux Olympiques, les prévisions de l’Insee indiquent que l’économie pourrait ralentir, malgré une désinflation plus prononcée que prévue. Les experts anticipent une contraction modeste du produit intérieur brut (PIB) au dernier trimestre de cette année, avec une estimation de -0,1%. Au cours du deuxième trimestre, la croissance s’est également révélée inférieure aux attentes, avec une augmentation de seulement 0,2%, contre 0,3% anticipé.
Dorian Roucher, directeur du département de la conjoncture à l’Insee, a exprimé ses préoccupations lors d’une récente conférence de presse, mentionnant que « l’environnement politique engendre une incertitude considérable sur le plan budgétaire ainsi que sur les comportements des acteurs économiques ». Bien que l’Insee n’ait pas modifié ses prévisions de croissance pour l’ensemble de l’année, maintenant une estimation à 1,1% tant pour 2023 que pour 2024, le nouveau Premier ministre, Michel Barnier, se trouve confronté à des défis immédiats avec la préparation du budget pour 2025.
Les prévisions de déficit budgétaire pour 2024 se sont aggravées, atteignant 5,6% du PIB, en comparaison avec une estimation antérieure de 5,1%. Ce contexte de croissance stagnante complique le paysage budgétaire pour le futur ministre de l’économie, dont l’identité reste à confirmer. Une activité économique en berne pourrait réduire les recettes fiscales, déjà en déclin, posant ainsi des défis majeurs pour l’administration fiscale.
Commerce extérieur et dépenses publiques : les deux moteurs à surveiller
L’Insee souligne que le commerce extérieur et les dépenses publiques demeurent les principaux moteurs de la croissance économique cette année. Du côté des exportations, la France commence à voir des signes de reprise, principalement en raison de la baisse des prix de l’énergie. La guerre en Ukraine, qui avait fait grimper les coûts de l’énergie à des niveaux historiques, a eu un impact significatif sur la balance commerciale française. Néanmoins, les chaînes d’approvisionnement, perturbées ces dernières années par divers conflits et crises, commencent à se stabiliser.
Roucher a observé que le secteur aéronautique et naval bénéficie d’un rattrapage significatif, avec de nombreuses commandes en attente. Cependant, il a également précisé que le pays n’est pas encore revenu à ses niveaux d’exportation d’avant 2019. En ce qui concerne la dépense publique, elle représente actuellement le principal moteur de la demande intérieure, soutenue par l’événement sportif majeur. Toutefois, les économies prévues de 10 milliards d’euros sur les dépenses de l’État, annoncées au printemps, pourraient exercer des pressions sur l’activité économique.
Une inflation maîtrisée, mais des effets mitigés sur la croissance
L’indice des prix à la consommation a récemment reculé sous la barre des 2% en août, après avoir été alimenté par la flambée des coûts de l’énergie et des denrées alimentaires. Actuellement, l’inflation est principalement soutenue par l’augmentation des prix dans le secteur des services. L’Insee prévoit une inflation moyenne de 2,1% pour l’année, ce qui devrait, en théorie, améliorer la situation des ménages et des entreprises.
Cependant, de nombreux économistes demeurent sceptiques quant à un retour rapide à une croissance robuste. La Banque centrale européenne (BCE) a récemment amorcé une politique de réduction des taux, avec une nouvelle baisse de 25 points de base, atteignant 3,5%. Pourtant, les effets de cette politique ne se feront sentir que dans un délai de 12 à 18 mois, laissant l’économie de la zone euro vulnérable aux conséquences de politiques monétaires restrictives.
Les experts commencent à s’inquiéter d’une divergence croissante entre les performances économiques de l’Europe et celles des États-Unis, où la dynamique de croissance semble plus prometteuse. Christopher Dembick, économiste chez Pictet Asset Management, a souligné que « la politique monétaire de la BCE n’est pas suffisamment accommodante ».
Consommation : un tableau préoccupant
Dans le secteur de la consommation, les signes de fatigue sont évidents. Les dépenses alimentaires ont chuté au premier semestre, signalant une stagnation persistante malgré une légère amélioration du pouvoir d’achat. Les ménages à faibles revenus, qui ont une propension à consommer plus élevée, continuent de faire face à des augmentations de prix significatives. La flambée des coûts alimentaires, exacerbée par la guerre en Ukraine, a contraint ces ménages à réduire leurs dépenses.
Bien que les prix de l’énergie aient légèrement diminué, offrant une lueur d’espoir pour une reprise du pouvoir d’achat en fin d’année, la consommation alimentaire semble toujours en déclin. Les économistes de l’Insee notent que les dépenses alimentaires, après une période de légère reprise, ont à nouveau montré des signes de faiblesse.
Emploi et conditions du marché du travail : une tendance à la détérioration
En ce qui concerne l’emploi, l’Insee n’a pas mis à jour ses indicateurs depuis juillet dernier, mais les prévisions indiquent un ralentissement significatif après une période d’amélioration. Les perspectives d’emploi s’annoncent moins favorables avec l’augmentation de la population active due à la réforme des retraites. Les créations d’emplois peinent à suivre le rythme de l’activité économique, ce qui pourrait affecter les gains de productivité.
Des coupes dans les aides à l’apprentissage sont également envisagées, ce qui pourrait avoir des conséquences sur le marché de l’emploi. Le taux de chômage, selon les normes du Bureau international du travail, pourrait grimper à 7,6% de la population active, contre 7,1% en début d’année. Cette situation pose un défi considérable pour le nouveau gouvernement, qui devra naviguer dans un environnement économique de plus en plus difficile.