Après avoir traversé la crise sans encombre ou presque, les géants mondiaux (français) du luxe ont encore de belles perspectives de croissance, à en croire les dernières tendances du marché identifiées par le cabinet Bain & Company.
Si le marché parisien a grimpé à un nouveau pic annuel -et depuis septembre 2000- vendredi (en se rapprochant des 6.500 points), il le doit en grande partie au compartiment du luxe « qui se porte comme un charme » pointe John Plassard, directeur des investissements chez Mirabaud. « Songez seulement, depuis la crise du Covid-19 la fortune personnelle de Bernard Arnault a tout simplement doublé » constate-t-il. Au point que le patron de LVMH devienne brièvement, ce lundi, l’homme le plus riche du monde devant Jeff Bezos selon Forbes, avec une fortune « virtuelle » estimée à plus de 185 milliards de dollars.
Et ce n’est sans doute pas fini pour ce secteur « mis en exergue » depuis juin 2020 par Mirabaud, qui dispose encore de « relais de croissance importants » selon John Plassard, qui cite pêle-mêle la Chine, la jeunesse, les ventes en ligne ou encore la croissance de la classe moyenne à l’échelle mondiale.
Premier relais de croissance, identifié de longue date, le marché chinois « est depuis quelques années un moteur pour l’industrie du luxe avec une croissance de 26% à taux de change constant et 44 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2020 » souligne John Plassard. « Les clients chinois ont généré 90% de la croissance du secteur l’année dernière et représentent 35% des achats en valeur au niveau mondial » développe-t-il. Ce qui explique, en grande partie, comment les géants tricolores du secteur (LVMH, Kering, Hermès) sont parvenus à limiter le déclin de leurs ventes, dépassant allègrement les attentes des analystes.
LVMH dans le top 20 mondial de la Bourse
Cette résilience a permis à LVMH d’intégrer pour la première fois le top 20 des groupes les mieux valorisés de la planète (18e), quand Hermès a grimpé sur le podium des plus grosses capitalisations tricolores.
Il apparaît en outre vraisemblable que la Chine continue à entretenir la croissance des revenus du secteur, comme l’explique John Plassard: « La politique du gouvernement et la réduction des différentiels de prix ont contribué à soutenir la consommation locale [et] on considère que, d’ici 2025, la moitié des achats d’articles de luxe devrait être effectuée par des clients chinois, pour 28% du chiffre d’affaires mondial, contre 11% actuellement ».
Près de 30% d’achats en ligne en 2025
Ce phénomène sera notamment alimenté par l’émergence d’une vaste classe moyenne chinoise, puisque selon le cabinet d’études Bain & Company, la base de clientèle du marché du luxe pourrait atteindre 450 millions de clients en 2025, contre 390 millions en 2019. Ce qui « va soutenir la croissance des produits d’entrée de gamme, qui représentent déjà une part importante du marché (35% pour la maroquinerie et 30% pour la joaillerie), et des canaux de distribution à prix cassés (11% de croissance en 2019 pour une valeur de 36 milliards d’euros) » détaille John Plassard.
Les nouveaux canaux de distribution constituent d’ailleurs un autre élément porteur pour le marché, puisque les achats en ligne devraient peser 30% du marché en 2025, après avoir quasiment doublé sa part de marché en 2020 (23%, contre 12% en 2019).
Dernier relais de croissance à ne pas négliger pour les investisseurs: la jeunesse. Car il semble loin le temps où les plus grandes enseignes tentaient essentiellement de séduire une certaine clientèle bourgeoise et quelque peu âgée. À grands coups de collaborations -Chanel et Pharrell Williams, Vuitton et Supreme, Rihanna et LVMH, la superstar coréenne Kai et Gucci, etc.-, les marques s’attaquent désormais à la jeunesse. Et cela fonctionne, toujours selon Bain et Company, qui constate que les « millenials » (soit la génération Y, à savoir les personnes nées entre le début des années 1980 et la fin des années 1990) représentaient 35% du marché en 2019, une part qui pourrait atteindre 45% en 2025. « Mais c’est la génération qui leur succède, la Génération Z, qui pourrait bien bouleverser le secteur. En effet, elle devrait générer 40% des achats de produits de luxe d’ici à 2035 et ces jeunes consommateurs affichent des comportements de consommation très différents des générations précédentes » observe John Plassard. De quoi augurer encore de beaux jours pour le secteur.