Contraint d’intégrer un contexte macroéconomique défavorable, le gouvernement français a revu à la baisse sa prévision de croissance pour 2020, tandis que les baisses d’impôts annoncées en réponse au mouvement des “gilets jaunes” vont grever la réduction de la dette.
Dévoilé par le ministère de l’Économie et des Finances en amont de la présentation du projet de budget pour 2020, le 25 septembre prochain, le scénario du gouvernement n’affiche plus qu’une prévision de croissance de 1,3%, contre 1,4% attendu jusqu’ici.
La France va ainsi être rattrapée par le ralentissement économique qui touche déjà l’économie mondiale et européenne, aggravé par les tensions commerciales, alors que la croissance devrait déjà se tasser cette année à 1,4%, contre 1,7% en 2018.
Toutefois, on défend à Bercy la résilience de l’économie française, qui resterait portée par des moteurs internes: consommation des ménages, investissements des entreprises, bonne tenue de l’industrie, et baisse du chômage.
Cette prévision prudente pour 2020 complique toutefois un peu plus une équation budgétaire déjà tendue, avec l’ensemble des mesures de pouvoir d’achat annoncées en réponse au mouvement des “gilets jaunes” et la difficulté à trouver suffisamment d’économies pour les financer.
– Économies: le compte n’y est pas –
Conséquence dans ce premier budget post-“gilets jaunes”: si le déficit public va bien baisser l’an prochain (de 3,1% du PIB en 2019 à 2,2%), une grande partie du recul s’explique par la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en baisse de charges qui avait plombé l’exercice budgétaire de l’an dernier. Hors cet effet exceptionnel, le déficit va en réalité stagner, alors que le gouvernement voulait le réduire à 2% dans les prévisions transmises au printemps à la Commission européenne.
L’écart par rapport à cette prévision s’explique aussi par la baisse d’impôt sur le revenu de 5 milliards d’euros annoncée par Emmanuel Macron à la suite du mouvement des “gilets jaunes” et la réindexation d’une partie des pensions de retraites sur l’inflation pour un coût de 1,5 milliard d’euros.
La dépense publique va d’ailleurs encore croître en 2020, et son niveau rapporté au PIB, actuellement le plus élevé de l’Union européenne, devrait lui peu baisser, passant de 53,8% en 2019 à 53,4% en 2020, alors que le gouvernement espère toujours une baisse de 3 points sur l’ensemble du quinquennat.
En face, le gouvernement n’a pu trouver les économies pour financer l’ensemble de ce surcroît de dépenses. Suppression de niches fiscales en faveur des entreprises, décalage de la baisse de l’impôt sur les sociétés, rabot sur certaines prestations sociales: le compte n’y est pas. Et cela même si la baisse des taux d’intérêt devrait permettre d’économiser 5 milliards d’euros sur les charges de la dette.
Le gouvernement prend donc du retard sur la réduction de la dette publique — 98,7% du PIB attendu en 2020 après un bond à 98,8% cette année –, pourtant un des objectifs majeurs du quinquennat avec la baisse des prélèvements obligatoires. Ces derniers devraient d’ailleurs légèrement remonter à 44% du PIB l’an prochain, après une baisse de 1,2 point à 43,8% cette année.
Une décision assumée à Bercy, où l’on affirme que le rythme de baisse de la dépense et de désendettement devait être ajusté pour tenir compte des demandes des Français. “Vous ne pouvez pas faire comme s’il n’y avait pas eu un mouvement social de très grande ampleur”, expliquait cet été Bruno Le Maire pour justifier l’augmentation des dépenses publiques.
Ces prévisions macroéconomiques seront examinées dans les prochains jours par le Haut conseil des finances publiques, qui doit rendre un avis sur le scénario retenu par le gouvernement pour établir son budget 2020.