L’Autorité des marchés financiers (AMF) a analysé les données de reporting des acteurs intervenant sur le principal marché de dérivés de matières premières agricoles en Europe, sous sa supervision, le Matif. L’AMF rappelle que les plateformes de négociation sont tenues de fournir aux régulateurs les positions détenues par chaque intervenant. Sur cette base, le gendarme boursier a analysé le profil des catégories d’intervenants sur les marchés des contrats sur le blé, le maïs et le colza du Matif (Euronext) qu’elle supervise.
Parmi les principaux constats, il ressort de l’étude que, sur la période 2018-2021, les entreprises commerciales ont joué un rôle prépondérant sur le marché européen des dérivés de matières premières agricoles, sur les échéances rapprochées comme les échéances plus éloignées: sur le contrat blé du Matif, référence pour les prix en Europe, elles représentent en moyenne quotidienne près de 57% des positions ouvertes.
A titre de comparaison, cette catégorie d’intervenants ne représente que 23% des positions ouvertes sur les contrats blé à Chicago rappelle l’AMF, place de marché incontournable des contrats agricoles où les acteurs financiers y sont au contraire largement majoritaires en proportion et en nombre.
Par ailleurs, du côté du Matif, 62% des positions à terme des entreprises commerciales sont déclarées comme correspondant à une activité de couverture du risque de variation de prix sur les grains. En effet, note l’AMF, cette catégorie d’intervenants sur le marché du blé est quasiment toujours nette vendeuse (positions vendeuses soustraites des positions acheteuses), ce qui signifie que les positions prises par les entreprises commerciales servent globalement davantage à garantir un prix de vente et donc plus les protéger d’une potentielle baisse que d’une hausse.
L’influence du conflit ukrainien sur le Matif
A l’occasion de cette étude, l’AMF a également examiné l’évolution de la structure du marché depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie le 24 février 2022. Elle s’est plus particulièrement intéressée à l’impact éventuel de la hausse des dépôts d’actifs exigés par les chambres de compensation dès l’ouverture d’une position (marges initiales) et à l’influence éventuelle des acteurs financiers sur la hausse des cours.
Sur la période 24 février-1er juin 2022, il en ressort que le nombre de contrats à l’achat ou à la vente détenus par les intervenants (appelé la position ouverte) a continué de croître malgré la hausse des marges initiales exigées par la chambre de compensation pour faire face à la volatilité des cours. Cette hausse des appels de marge ne semble donc pas avoir dissuadé les participants d’accéder au marché, note l’étude.
La proportion des acteurs financiers dans les positions a augmenté après l’invasion ukrainienne, surtout au cours des 3 premières semaines du conflit, mais elle s’est ensuite stabilisée et la part observée au 1er juin était proche de son niveau à la même date en 2021, autour de 50%.