Sanofi accélère ses investissements dans l’ARN messager avec le rachat à 3,2 milliards de dollars d’un spécialiste américain, Translate Bio.
Sanofi veut décidément sa part de l’ARN messager, une innovation pharmaceutique très en vue depuis la crise du Covid-19 : après avoir annoncé récemment d’importants investissements, le géant français accélère encore avec le rachat à plusieurs milliards d’euros d’un spécialiste américain, Translate Bio.
“Sanofi va acquérir Translate Bio et accélère le déploiement de la technologie de l’ARNm dans le développement de vaccins et d’agents thérapeutiques”, a annoncé mardi le français dans un communiqué.
L’opération, qui doit être conclue au troisième trimestre, valorise Translate Bio 3,2 milliards de dollars, soit 2,7 milliards d’euros.
L’américain se trouve sur le même créneau que son compatriote Moderna et l’allemand BioNTech, des noms que le grand public a découvert à l’occasion de la crise du Covid-19.
Ils ont tous misé sur l’ARN messager. Cette technologie a connu un développement fulgurant avec la pandémie due au coronavirus, alors qu’elle était auparavant considérée comme un pari incertain.
Les vaccins développés par BioNTech – avec l’américain Pfizer – et Moderna ont été parmi les premiers à être autorisés contre le Covid-19 et sont, pour l’heure, les plus efficaces.
Contrairement à un vaccin classique, qui utilise une version affaiblie ou neutralisée d’un virus, la technologie de l’ARN messager introduit directement dans les cellules une séquence de génome pour qu’elles génèrent les anticorps destinés à reconnaître le virus et l’éliminer.
Sanofi lui-même collabore déjà étroitement avec Translate Bio sur un projet de vaccin à ARN messager contre le coronavirus, à un stade encore précoce puisqu’il n’est pas encore testé à grande échelle.
Mais, si le Covid-19 a révélé cette technologie au grand public et considérablement accéléré son développement, ses promesses dépassent de loin cette seule maladie.
BioNTech a par exemple annoncé le mois dernier un projet de vaccin contre la malaria. Plus largement, les pionniers de l’ARN messager promettent de répondre à une immense gamme de maladies, qui vont du sida à plusieurs types de cancer.
Projet contre la grippe
Sanofi ne veut pas rater ce tournant. Le géant français avait déjà, voici quelques semaines, annoncé un vaste programme d’investissements dans l’ARN messager – deux milliards d’euros d’ici à 2025 – avec notamment la création d’un centre de recherche spécialisé.
Il compte développer plusieurs vaccins, ciblés sur les maladies infectieuses, mais reste discret sur ses ambitions exactes. Sanofi a, toutefois, d’ores et déjà lancé de premiers essais avec Translate Bio pour un vaccin contre la grippe saisonnière, une annonce faite en juin.
Le rachat de l’américain accentue encore ce pari car Sanofi aurait pu se contenter du partenariat déjà étroit qui le liait à Translate Bio.
Cette prise totale de contrôle “permettra d’exploiter toutes les possibilités offertes par l’ARN messager”, a expliqué mardi dans le communiqué Paul Hudson, directeur général de Sanofi.
“Nous serons également en mesure d’accélérer la conduite des programmes de développement que nous menons actuellement en partenariat” avec Translate Bio, a-t-il ajouté.
Le français a, de fait, beaucoup de liquidités à disposition, depuis qu’il a revendu l’an dernier sa part d’un autre partenaire américain Regeneron, une gigantesque opération qui lui a permis de récupérer une dizaine de milliards d’euros.
Sanofi doit aussi répondre à des critiques en matière d’innovation, notamment de responsables politiques français qui lui reprochent de n’avoir pas été en mesure de développer un vaccin anti-Covid-19 aussi vite que d’autres groupes.
Le français promet de mettre en décembre sur le marché un premier vaccin contre le Covid-19 – un projet distinct de sa collaboration avec Translate Bio et qui n’est pas basé sur l’ARN messager-, soit près d’un an après l’arrivée des vaccins Pfizer/BioNTech et Moderna.
Le groupe, ainsi que nombre d’observateurs du monde pharmaceutique, ont toutefois souligné que ces délais restaient extraordinairement rapides par rapport aux nombreuses années habituellement nécessaires pour développer un vaccin.